Guidée par
ses observations du monde naturel, Laurel Rennie conjugue le textile, la
sculpture et l’écriture dans des œuvres inspirées par les cycles de la vie et
de la mort. Le folklore, l’intelligence autre qu’humaine, notamment végétale,
et les modes de connaissance non scientifiques, sensibles et intuitifs occupent
une place importante dans son travail. À la manière d’une alchimiste, l’artiste
façonne des mondes spéculatifs qui enchevêtrent les histoires, les expériences,
les rêves et les matérialités du vivant. Entre ses mains, les textiles, le bois,
les plantes et leur potentiel tinctorial laissent émerger leurs sensibilités et
leurs savoirs, de façon à mettre en lumière nos relations et nos récits noués.
Entre-mondes
Puisant dans
les motifs tissés par la nature, Laurel Rennie élabore des compositions qui
entretiennent un rapport étroit entre la surface et le monde souterrain.
Méandres racinaires; traînées de limaces; aspérités de l’écorce; drupéoles
charnues; coques épineuses : les assemblages colorés de l’artiste font
émerger les traces d’existences texturées qui échappent souvent à notre
perception. Alors que le monde devient davantage inhospitalier à de nombreuses
formes de vie, en grande partie en raison de l’impact humain, Laurel se tourne
vers des stratégies employées par les végétaux, qui ont développé une
intelligence collective et une manière de vivre ensemble, afin de concevoir des
(éco)systèmes alternatifs.
À travers
la confection de courtepointes teintes à la main, elle aborde notre capacité à
entrer en contact avec notre environnement. L’immense installation Thorn Bed se déploie au sol, délicatement posée sur de massives épines en bois. L’œuvre
imite la composition d’un sol forestier, où s’entrecroisent et interagissent de
multiples éléments, tels que les racines des arbres, le bois en décomposition,
les champignons, le mycélium et les insectes. Ces écosystèmes sont des espaces intermédiaires
qui relient la surface et le monde souterrain; des entre-mondes où les
nutriments sont transférés, où les matières se transforment, où les choses (se)
reposent. Ils constituent le lit de la forêt. Or, à l’inverse d’un humus
moussu, le sol forestier de Thorn Bed n’invite pas à s’y allonger.
L’installation met en lumière la complexité et la précarité qui marquent les
relations humaines avec le vivant et les écosystèmes naturels.
La pièce
murale Night Roots s’inspire de la croissance des végétaux,
spécifiquement celle qui a lieu dans l’obscurité. Pour la plupart des espèces,
la nuit est réparatrice. Elle permet aux plantes d’entretenir leur métabolisme
et de grandir en redistribuant leurs réserves vers les jeunes feuilles, les
fruits et les tiges. À l’insu des humains, sous le couvert de la nuit, des
mondes se reconstruisent lentement sous nos pieds. Night Roots symbolise
la réparation et la croissance intérieures, celles qui se produisent
discrètement et dans la lenteur, mais qui sont essentielles à la vie. Dans le
jardin nocturne de Laurel Rennie, la flore pousse selon ses propres cycles
internes, déliés des pressions externes et protégés de nos interventions
dommageables.
Employé dans l’étude
scientifique des mécanismes de perception chez les plantes, le mimosa pudique –
aussi appelé sensitive ou trompe-la-mort – est reconnu pour rétracter ses
feuilles à la moindre stimulation tactile. L’œuvre Touch-Me-Not se
penche sur le processus de défense de la plante à fleurs, qui parvient, grâce
au mouvement de ses feuilles, à dissimuler les pinnules et à désintéresser les
insectes. Alliant formes géométriques et organiques, l’artiste brouille les
couches de perspective de façon à complexifier l’accès aux éléments visuels.
Elle repense notre rapport au regard à travers le prisme de l’écologie et,
s’inspirant des recherches du psychologue James J. Gibson dans le champ de
la perception visuelle, considère la perception en tant que fonction pleinement
corporelle. Touch-Me-Not témoigne des systèmes
primordiaux de perception humaine, d’un retour à un pur moment de stimuli visuels,
tactiles et réactionnels.
Guided by her observations of the natural world, Laurel Rennie combines textiles, sculpture and writing in works inspired by the cycles of life and death. Folklore, non-human intelligence—particularly plant intelligence—and non-scientific, sensory and intuitive modes of knowing play a central role in her practice. Like an alchemist, the artist shapes speculative worlds that intertwine stories, experiences, dreams and the materiality of living things. In her hands, textiles, wood, plants and their dyeing potential reveal their sensitivities and knowledge, shedding light on our relationships and the narratives we weave.
In-between worlds
Drawing on patterns woven by nature, Laurel Rennie creates compositions that explore the close relationship between the surface and the underground world. Root meanders, slug trails, bark textures, fleshy drupes, spiny husks: the artist’s colourful assemblages bring forth traces of textured existences that often escape notice. As the world becomes increasingly inhospitable to many forms of life, largely due to human impact, Laurel turns to strategies employed by plants, which have developed a collective intelligence and ways of living together, to conceive alternative (eco)systems.
Through the creation of hand-dyed quilts, she explores our capacity to engage with the environment. The large installation Thorn Bed spreads across the floor, delicately resting on oversized wooden thorns. The work mimics the composition of a forest floor, where a multitude of elements, from tree roots to decaying wood, fungi, mycelium and insects, intersect and interact. These ecosystems are liminal spaces that link the surface to the underground world, in-between worlds where nutrients are transferred, matter transforms and things rest. They form the bed of the forest. Yet, unlike a mossy humus, the forest floor of Thorn Bed is hardly an invitation to lie down. The installation highlights the complexity and precarity inherent in human relationships with living beings and natural ecosystems.
The wall piece Night Roots is inspired by plant growth, specifically the growth that occurs in darkness. For most species, nighttime is restorative. It allows plants to maintain their metabolism and grow by redistributing resources to young leaves, fruits and stems. Hidden from human view, under the cover of night, worlds slowly rebuild themselves beneath our feet. Night Roots symbolizes inner repair and growth, processes that unfold quietly and slowly, yet are essential to life. In Laurel Rennie’s nocturnal garden, flora grows following its own internal cycles, freed from external pressures and protected from our harmful interventions.
Used in the scientific study of plant perception mechanisms, the sensitive plant (Mimosa pudica), also known as the “touch-me-not” or “fainting plant,” folds its leaves at the slightest tactile stimulus. The work Touch-Me-Not explores this flower’s defensive process, whereby the movement of its leaves conceals the pinnules and deters insects. Combining geometric and organic forms, the artist blurs layers of perspective to complicate access to visual elements. She rethinks our relationship to seeing through the lens of ecology and, drawing on the research of psychologist James J. Gibson in the field of visual perception, treats perception as a fully embodied function. Touch-Me-Not speaks to essential human systems of perception, to return to a raw, unmediated moment of seeing, touching and responding.
Born in Windsor, Ontario, Laurel Rennie lives in Montréal. She holds a Bachelor of Interdisciplinary Design from the Nova Scotia College of Art and Design University and a Master of Fine Arts with a concentration in Fibres and Material Practices from Concordia University. Her work has been shown in several exhibitions, most recently at McBride Contemporain (Montréal), the FOFA Gallery (Montréal), Zalucky Contemporary (Toronto), the Leonard & Bina Ellen Art Gallery (Montréal) and Eyelevel Gallery (Halifax).
THÈME
RÉCIPROCITÉS
COMMISSAIRE
PROGRAMMATON
SARA A.TREMBLAY
LORNA BAUER
NATACHA CLITANDRE
RACHEL CRUMMEY
CRÉATIONS SANS ESCALE
KUH DEL ROSARIO
LINDSAY KATSITSAKATSTE DELARONDE
ZAYNAB GHAÏS-MORTADA
MARIE-JOSÉ GUSTAVE
HORIZON FACTORY
RYTHÂ KESSELRING
LAUREL RENNIE
VICKY SABOURIN
SALT
MARIA SIMMONS
CHRISTINE SIOUI WAWANOLOATH
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